Mon mois de Ramadan

Publié le 3 avril 2023 à 22:12

Je suis musulmane.

Je le suis depuis ma naissance, de parents musulmans. Nous sommes d’origine comorienne, français.

Cette religion fait parti de moi, je l’ai toujours connu. J’ai toujours entendu les prières, senti le souffle de ma mère après un fatiha, attendu mon père à la sortie de la mosquée. C’était juste naturel, apaisant, et sécurisant de vivre sous cette confession. Et honnêtement, je ne me suis pas posée beaucoup de questions sur les autres religions.

 

Je me souviens des évangéliques qui venaient taper à la porte, ma mère leur ouvrait. Elle en a même parfois accueilli certains pour boire un thé. Ma mère a toujours respecté les autres croyants. Elle aime parler de Dieu. C’était toujours intéressant. Et à la fin, elle leur disait « Nous on croit en Dieu, c’est important. On est bien avec Allah, tout va bien. » Et ils repartaient. Tout le monde était très contents.

 

Vraiment! Ça se passait comme ça. Avant les attentats, Charlie Hebdo, Zemmour et j’en passe. Je me souviens, le jour où les Twin Towers se sont effondrés, et ou Oussama Ben Laden étaient recherché, mon père avait dit: « Ils nous font du mal, trop de mal à notre religion. » Et ça n’a plus jamais été pareil.

 

Tout a changé. Il y avait une méfiance vis à vis de l’Islam. Et cette méfiance finira par devenir une vraie phobie chez certain. On n’était plus tranquille après les prières. Les gens se cachaient, des prêcheurs inconnus venaient inonder les jeunes cerveaux d’idées haineuses, pleine de révolte. Et à la maison, on a toujours observé ça, tristes, impuissants et inquiets.

 

Ça n’a pas été une mince affaire, pour mes parents, de m’apprendre la religion. J’étais rêveuse, dans mon imaginaire, et mes dessins. Ils ne me décourageaient jamais dans mes passions, mais ils tentaient de me donner les bagages nécessaires pour pratiquer. Je me souviens de tous ces versets à apprendre par coeur. Ça me plombait. Je regardait énormément le plafond, au grand désespoir de ma mère. Et elle disait « On t’aura appris, après tu fait ce que tu veux ».

 

Mais j’ai cru, j’ai toujours cru en Allah, le Bon Dieu. Je sentais littéralement sa présence. Il était dans notre maison, en nous, Il nous inspirait ces rêves que j’aimais tant. Il me donnait l’inspiration et Il me protégeait. Je n’ai pas eu d’ami imaginaire, j’avais mieux, j’avais ma foi. Je voulais juste m’en rapprocher comme je voulais, à ma façon.

L’Islam est une religion moins rude que certains pourraient le croire, pas plus que celle des juifs, des catholiques ou des protestants. Il faut juste retenir les piliers et les appliquer autant qu’on peut. Le reste je dois dire que pour moi, ce n'est que les interprétations plus ou moins pertinentes de certains érudits. Je les respecte mais j'ai mon opinion et je me concentre sur les 5 principaux piliers. 

  1. La profession de foi

Croire en un Dieu unique, Allah. Et au dernier prophète Mahomet.

   2. La Prière

5 par jour, tourné vers la Qibla, en direction de la Mecque.

   3. L’aumône

Garder un coeur généreux en donnant avant de recevoir. Payer la Zakat (impôt)

   4. Le jeûne du mois de Ramadan

Se priver de manger, boire, avoir des relations, du lever au coucher du soleil. Et se concentrer sur ses prières.

   5. Le pèlerinage à la Mecque

Se rendre à la Mecque et aux régions voisines, accomplir le Hadjdj.

La profession de foi est arrivée tôt, à l’école coranique, on nous racontait les versets, et on les récitait en public. Ceux qui le faisaient brillamment étaient vivement félicités. Autant dire que je n’étais pas la première, mais j'y mettais e coeur. Une fois qu’on a maîtrisé les principaux versets, la Prière est assez simple. Mais dans une société occidentale, il faut prendre le rythme et l’habitude. On doit souvent rattraper en fin de journée. Et j’ai toujours eu du mal à m’y plier, jusqu’au confinement, et au Covid. La j'ai eu tout mon temps!  L’aumône est celle qui m’est le plus aisée. On nous retient toujours des taxes, c'est notre système en France. Il y a la Csg dans nos bulletins de salaires. Mais à titre plus personnel, à Paris, l’occasion ne manque pas de donner une pièce. Après, il y a le mois du Ramadan que je respecte depuis ma puberté. Et c’est vraiment mon préféré. Ça peut paraître étrange mais ce pilier a plus de signification pour moi que tous les autres. Je le trouve essentiel. Le pèlerinage, lui reste celui que j’espère faire avant ma retraite, ou pendant. Je ne sais pas encore mais je voudrais le faire avec des gens que j’aime.

 

Je reviens au mois du Ramadan. Nous y sommes depuis le 02 avril 2022. Ça doit faire mon 22e! On nous a appris que les portes du Paradis s’ouvrent et que les esprits malins sont enfermés. Ça devient de plus en plus difficile à croire en voyant tout ce qui arrivent de mal en si peu de temps. Mais nous ne sommes pas seuls sur Terre, et on ne peut pas diriger le coeur de tous vers une direction. Alors je jeûne dans un but, nous protéger du mal qui persiste et s’immisce, et ça pour tous, même ceux qui ne croient pas. Parce que nous sommes qu’une seule et même famille, le Coran parle de nous tous, même ceux qui ne croient pas.

Tout est écrit dans le Coran, on nous a écrit ce moment où le mal prendrait le dessus sur le bon. On nous a prévenu que la haine guiderait les décisions d’une grande majorité, et que ceux qui font du mal se feront passer pour les sauveurs. On nous a prévenu de se méfier des usurpateurs. Dixit les élections présidentielles. On nous a prévenu d’être endurants. On nous a annoncé que la Terre serait mis à mal, que le climat serait invivable, que ses bienfaits pourront diminuer. Dixit le bilan du GIEC. Alors lorsque je jeûne, je veux montrer à Dieu que je me repens de nos erreurs, qu’on veut s’améliorer quitte à se priver. Et j’espère sincèrement que cela pourra nous permettre d’avoir encore des années de bonheur et de répit.

Et je ne sais pas quand, comment, mais je pense au moment du jugement dernier. Et à chaque Ramadan, j’essaie d’être juge de tout ce que j’ai fait avant. Il faut se réveiller avant. Il faut essayer de mieux faire, il faut essayer de bien faire!

Alors peut-être que ceux qui liront ne seront pas forcément musulmans, mais ce n’est pas grave. Je veux juste que vous sachiez qu’en tant que musulmane, comme beaucoup de musulmans, nous prions, et nous croyons pour tous. Notre religion n’est qu’une expression supplémentaire de la foi et de l’amour qui naît dans les cœurs. C'est un moyen comme un autre de se remettre en question, trouver un équilibre et faire pénitence.  Il est tant de s’accepter et de s’écouter les uns les autres. La planète a besoin d'aide. 

Je ne suis pas une musulmane parfaite. Je suis plutôt libre, entêtée et originale. Mais je crois que nous sommes tous liés dans l’adversité. Et mes prières sont l’écho de nos espoirs.

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